Comment rater sa psychanalyse en 10 conseils

  1. Entretenez la croyance qu’on ne peut qu’être déçu : si vous voulez vous éviter de perdre du temps, de l’argent, ne composez même pas le numéro de ce psy qu’un ami vous a si chaleureusement recommandé.
  2. Si vous l’avez fait quand même, rien n’est perdu : entretenez la croyance que votre analyste est une sorte de prof censé vous guider vers un Eldorado dont il doit avoir une vision claire. S’il refuse de vous en énumérer les étapes, c’est qu’il est incompétent.
  3. Dites-vous que votre analyste jouit d’avoir du pouvoir sur vous, sans doute pour réparer son narcissisme blessé. La preuve : cette personne ne joue pas franc jeu, ne raconte jamais rien d’elle et ne révèle pas ses faiblesses, alors que vous avez eu, vous, le courage de parler des vôtres !
  4. Convainquez-vous que votre analyste fait semblant d’être gentil : en réalité, cette personne vous juge.
  5. Répétez-vous que votre analyste est peut-être sadique : cette personne voit tout, sait tout de vous, comprend tout. Elle pourrait vous aider, mais elle préfère vous laisser patauger et vous regarder vous noyer.
  6. Méfiez-vous de vos perceptions : si vous avez l’impression d’être apprécié par votre analyste, dites-vous bien qu’en réalité, cette personne n’en a que pour votre argent. La preuve : elle refuse de coucher avec vous ou même de boire un simple verre en votre compagnie ! Il est impossible de la rencontrer en dehors du cadre derrière lequel se planque l’hypocrite.
  7. Ne vous leurrez pas : votre analyste vous manipule ; cette personne est en réalité une sorte de gourou, qui essaie de vous amener à une certaine vision de vous-même et du monde pour mieux vous rendre dépendant d’elle.
  8. Vous avez de « vrais problèmes » qui nécessitent des solutions concrètes et rapides. Répétez-vous que votre analyste n’est rien qu’un privilégié qui reçoit d’autres privilégiés : des personnes sans problèmes sérieux mais qui s’ennuient et n’ont rien de mieux à faire que s’extasier ou se plaindre en regardant leur nombril. La preuve : il y a même un divan où s’allonger pour mieux le contempler !
  9. Dites-vous que votre analyste est un intellectuel comme vous et ensemble, vous allez tout comprendre. Il s’agit de ne pas le décevoir, de le surprendre constamment. Vous êtes d’ailleurs sans doute son analysant le plus stimulant et donc, son préféré. Avec vous, il ne va pas s’ennuyer. Sinon, c’est que cette personne n’est peut-être pas aussi maligne qu’elle en a l’air…
  10. Pensez que le problème, ce n’est peut-être pas votre mère, ni votre père, mais votre analyste.

Et si vraiment, malgré tous vos efforts, rien n’y fait, rassurez-vous. En ultime recours, il vous restera toujours l’arme fatale, imparable, la botte secrète de tout analysant : l’ennui. Dans ce cas, deux solutions s’offrent à vous : ou bien vous vous appliquerez à parler en séance comme  chez votre coiffeur, en prenant soin de déjouer toute tentative de votre analyste de vous faire décoller du factuel ; ou bien vous veillerez à vous plaindre continuellement auprès de cette personne sans jamais rien tenter d’autre : vous finirez, tôt ou tard, par avoir raison de son indécrottable enthousiasme. Dans les deux cas, tenez bon jusqu’à ce que celle-ci soit tout à fait morte d’ennui.